Newsletter n° 22 – 26 mai 2023

Les conditions de travail influencent la fin de carrière des seniors

Chaque année, tous secteurs d’activité confondus, environ 30 % des départs en fin de carrière ne relèvent pas d’un passage immédiat de l’emploi vers la retraite, selon une note d’analyse publiée par France Stratégie en avril 2023. Ces sorties précoces de l’emploi s’expliquent par trois causes principales : les raisons de santé, le chômage et l’inactivité.

La DARES, dans sa note à destination du Conseil à l’Orientation de l’Emploi (COE), fait un diagnostic précis par métier des fins de carrière hors retraite ou pré-retraite. Ces départs précoces recouvrent trois situations différentes, dont les définitions sont données par le Bureau International du Travail (BIT) :

• Les raisons de santé : personnes en non-emploi qui déclarent avoir quitté leur emploi pour longue maladie ou pour invalidité dès 51 ans, et personnes en emploi mais en congé de longue maladie dès 56 ans

• Le chômage pour les personnes âgées de 59 ans ou plus

• Les autres types d’inactivité, pour les personnes âgées de 56 ans ou plus. Cela peut concerner des personnes ayant renoncé à la recherche d’un emploi ou indisponibles, par exemple car ils ont la charge d’un proche en situation de dépendance

Les métiers les plus concernés par les départs précoces se trouvent dans l’hébergement restauration (employés polyvalents, cuisiniers), le bâtiment (second œuvre et gros œuvre), les services aux particuliers et aux collectivités (services à la personne, agents d’entretien) et la manutention.

Dix des quinze métiers ayant les taux de départ précoces les plus élevés sont également parmi ceux dont les travailleurs déclarent le plus fréquemment « ne pas se sentir capables de continuer à exercer leur travail jusqu’à la retraite ».

En ce qui concerne le chômage et l’inactivité, il existe une corrélation modérée entre les sorties précoces et la catégorie socioprofessionnelle. Toutefois, les travailleurs peu qualifiés occupant des postes d’employés ou d’ouvriers sont surreprésentés dans les sorties précoces motivées par des raisons de santé.

Les métiers du BTP avec la part de départs précoces de l’emploi la plus élevée, 2004-2019

Lecture : entre 2004 et 2019, parmi les ouvriers peu qualifiés du second œuvre du bâtiment qui partent en fin de carrière, 31% le font pour raison de santé. 

Plusieurs métiers du secteur du BTP figurent parmi les 20 métiers ayant les taux de départs précoces les plus élevés. Parmi eux, on retrouve les ouvriers peu qualifiés du second œuvre (31%) et du gros œuvre du bâtiment (24%), ainsi que les ouvriers qualifiés du gros œuvre du bâtiment (18%) et de l’électricité (14%). Ces métiers sont également parmi ceux où les travailleurs sont les plus nombreux à répondre « non » lorsqu’on leur demande « Vous sentez-vous capables de faire le même travail qu’actuellement jusqu’à la retraite ? ».

Bien que les raisons de santé à l’origine de ces sorties prématurées puissent être attribuées à des facteurs externes à l’activité professionnelle, il a été constaté que des conditions de travail difficiles augmentent le risque d’accidents du travail. Les travailleurs exerçant ces métiers identifient plus fréquemment des conditions de travail insatisfaisantes ou des problèmes de santé comme des facteurs importants contribuant à leur départ anticipé à la retraite.

La sur-représentation de ces métiers, en particulier ceux qui quittent leur emploi pour des raisons de santé ou qui tombent dans le chômage, peut être analysée en relation avec les conditions de travail et les pratiques de gestion de la main-d’œuvre propres aux métiers concernés.

Conditions de travail et santé : une relation étroite

La relation entre départs précoces pour raisons de santé et conditions de travail, invite à s’interroger sur les métiers où l’amélioration de ces conditions pourrait contribuer à réduire les sorties précoces de l’emploi et à répondre aux difficultés de recrutement actuelles. Les indicateurs de tension calculés par la Dares et Pôle emploi (voir ici) montrent que les contraintes liées aux conditions de travail et la proportion de départs précoces pour raisons de santé ressortent comme en partie corrélées. (Voir graphique ci-dessous).

En eff­et, aucun métier ne présente un taux élevé de départ pour raisons de santé (supérieur à 15 %) et des conditions de travail peu contraignantes. Corrélation ne veut pas dire causalité, mais plusieurs travaux ont de fait montré qu’être surexposé à la pénibilité physique au long de la carrière favorise le retrait précoce de l’emploi avant 60 ans.

L’amélioration des conditions de travail – voire de salaire – et la prévention de l’usure professionnelle, pour que ces professionnels retardent l’âge de leur départ à la retraite, contribueraient à augmenter le taux d’emploi et à réduire les difficultés de recrutement.

 

Les métiers avec la part de départs pour chômage la plus élevée, 2004-2019

Sources : France Stratégie à partir des enquêtes Emploi (2004-2019) INSEE et des enquêtes Conditions de travail 2013,2016, et 2019 (DARES-DREES-DGAFP

Lecture : entre 2004 et 2019, parmi les cadres du bâtiment et des travaux publics qui partent en fin de carrière, 9% le font suite à une perte d’emploi conduisant au chômage (contre 4% en moyenne, tous métiers confondus).

Parmi les 20 métiers avec la part de départ pour chômage la plus élevée, figurent les cadres du BTP, les ouvriers qualifiés du gros œuvre du bâtiment et les ouvriers peu qualifiés du gros œuvre du BTP.

Les sorties précoces de l’emploi pour chômage ou inactivité (hors santé) sont assez bien réparties sur l’échelle des qualifications. Ainsi, parmi les vingt métiers les plus concernés par les sorties pour chômage, on retrouve aussi bien des ouvriers, des employés et des techniciens que des cadres (qu’il s’agisse de cadres dans les arts et spectacles, dans le bâtiment, dans la communication et l’information).

Les métiers avec la part de départs pour inactivité (hors santé et chômage) la plus élevée, 2004-2019

Sources : France Stratégie à partir des enquêtes Emploi (2004-2019) INSEE et des enquêtes Conditions de travail 2013,2016, et 2019 (DARES-DREES-DGAFP

Lecture : entre 2004 et 2019, parmi les conducteurs d’engins du bâtiment et des travaux publics qui partent en fin de carrière, 23% le font pour un motif d’inactivité (contre 15% en moyenne, tous métiers confondus).

Parmi les 20 métiers avec la part de départ pour inactivité la plus élevée, nous retrouvons les ouvriers qualifiés de l’électricité et de l’électronique (28%), les conducteurs d’engins du BTP (23%), les ouvriers qualifiés du second œuvre du bâtiment (20%) et les ouvriers peu qualifiés du gros œuvre du BTP (19%).

Source et graphiques : https://www.strategie.gouv.fr/publications/fin-de-carriere-seniors-specificites-selon-metiers

Vous êtes intéressé ? Besoin de plus d’information ? Contactez-nous :

Yavuz ELVERDI, Chargé d’études, yavuz.elverdi@ccca-btp.fr

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