BTP CFA Loire-Atlantique, acteur majeur de la mobilité européenne

7 octobre 2019 – À l’occasion des ErasmusDays 2019, BTP CFA Loire-Atlantique (site de Saint-Herblain) et le CCCA-BTP ont organisé un après-midi d’échanges et de rencontres autour de la mobilité européenne, en présence de Jean Arthuis, ancien député européen, promoteur de la mobilité longue chez les apprentis. 

Mobilité longue, brevet professionnel à composante européenne (BPCE)… BTP CFA Loire-Atlantique est un acteur actif de la mobilité européenne des apprentis en formation aux métiers du bâtiment et des travaux publics. À l’occasion du séminaire de clôture du projet transnational SoMexNet sur l‘utilisation du numérique dans l’organisation des parcours de formation à l’étranger (voir encadré), et dans le cadre des ErasmusDays, BTP CFA Loire-Atlantique a organisé une événement consacré à la promotion de la mobilité européenne dans les parcours de formation mis en place dans le réseau de l’apprentissage BTP, animé par le CCCA-BTP. 

 

 

« Cette journée a permis de réunir des partenaires européens, des institutionnels et des entreprises. C’est important de dire ce qu’on fait et d’expliquer pourquoi nous passons autant de temps à mettre en place les projets de mobilité européenne. En 2014, notre CFA a participé à l’expérimentation du brevet professionnel à composante européenne, initié par le CCCA-BTP. Nous avons démarré avec une quinzaine de jeunes. Aujourd’hui, ils sont une soixantaine d’apprentis répartis dans deux sections, maçonnerie et peinture. Nous avons le projet de créer une troisième section pour la mention complémentaire décoration. Au total, si nous ajoutons une quinzaine d’étudiants en BTS Enveloppe du bâtiment, et d’autres selon les projets des formateurs, une centaine de jeunes bénéficient de la mobilité européenne au sein de notre CFA. »
Philippe Dreyfus, directeur général de BTP CFA de Loire-Atlantique

 

Philippe Dreyfus

 

Mobilité longue, parfois difficile à mettre en place

En 2016, Jean Arthuis, alors député européen, avec le soutien de la Commission européenne, a lancé un projet pilote de mobilité longue des apprentis. Porteuse du projet, l’association Euro App’ (European apprenticeship programme) a regroupé 32 centres de formation, dont quinze en France, tous secteurs confondus. BTP CFA Loire-Atlantique, s’est inscrit dans cette initiative. L’objectif de ce projet pilote était de faire partir 150 jeunes en formation en CAP et bac professionnel. Seuls 75 ont pu y participer. 

« Cette expérimentation nous a confronté à de nombreux blocages d’ordre financiers, psychologiques, juridiques. Il y a aussi des freins académiques liés à la réticence de reconnaître les mois passés à l’étranger. Se pose aussi la question de l’autonomie financière du jeune quand il part dans un autre pays. » 
Jean Arthuis, ancien député européen

 

 

Faire émerger une citoyenneté européenne

Justine Ordreneau, 25 ans, est une heureuse bénéficiaire du projet pilote sur la mobilité longue des apprentis. Après un CAP et un brevet professionnel Peinture revêtements à BTP CFA Loire-Atlantique (Saint-Herblain), elle est arrivée en Italie en septembre 2017. Elle suit alors des cours d’italien à l’école du bâtiment de Pérouse et travaille à l’atelier de restauration et décoration d’Antonio Desiderio. « Cette expérience a été très riche et profitable. C’est la découverte d’une autre langue et d’autres façons de travailler. À mon retour en France, j’ai créé une micro-entreprise, afin de travailler en sous-traitance avec Antonio », explique Julie Ordreneau. « Julie est devenue une citoyenne européenne grâce à la mobilité longue. Elle s’exprime en italien avec aisance. Et prendre un avion entre Rome et Nantes est devenu naturel », ajoute Philippe Dreyfus, directeur général de BTP CFA de Loire-Atlantique.

 

Justine Ordreneau et Antonio Desiderio

 

Pour faire suite à cette initiative pilote, la Commission européenne a décidé de prolonger l’expérience, en intégrant au programme Erasmus+ un volet dédié à la mobilité longue des apprentis dès 2018. De son côté, Jean Arthuis se consacre à la création d’une fondation pour mettre en œuvre la mobilité longue des apprentis. 

« La mobilité longue peut avoir de l’intérêt pour tous les acteurs dans le BTP, même si aujourd’hui elle n’est pas dans la culture du secteur. Il faut encore lever certains blocages et apporter de la souplesse. Mais, si nous souhaitons développer la mobilité, il faut aussi le faire dans l’autre sens et d’attirer des jeunes européens en France. C’est le préalable à l’émergence d’une citoyenneté européenne. Par exemple, chaque année, nous recevons de jeunes allemands spécialisés dans l’installation sanitaire et thermique, les entreprises de la région sont ravies et font tout pour les garder. »
Philippe Dreyfus, directeur général de BTP CFA de Loire-Atlantique

 

 

SoMexNet : Une appli clé pour la réussite de son projet de mobilité

Piloté par le centre de formation belge IFAPME Liège-Huy-Waremme, ce projet vise à créer une application servant de boîte à outils pour préparer, réaliser et suivre la mobilité européenne des apprentis et du personnel, notamment en utilisant les médias sociaux. L’objectif est d’enrichir la démarche initiée en 2014 sous le nom Somex. Le projet est articulé autour de trois axes principaux :

  • élaborer une version IOS ;
  • créer une réseau d’organismes de formation utilisant l’appli ;
  • sensibiliser les apprentis aux avantages de la mobilité. 

 

 

Trois questions à Jean Arthuis, ancien député européen

 

Qu’est-ce qui vous a poussé à promouvoir la mobilité longue des apprentis ? 

Les jeunes connaissent un important taux de chômage. En France, en moyenne un sur quatre est sans emploi. Dans certains pays, plus d’un jeune sur deux en est victime. Là où l’apprentissage est enraciné dans la culture sociale et économique, comme en France, aux Pays-Bas, au Danemark ou en France, les jeunes échappent à ce drame. Les étudiants ayant bénéficié d’une bourse Erasmus+ et ayant effectué une mobilité longue dans un pays étranger semblent bien mieux protégés contre le risque de chômage. Je me suis demandé pourquoi les apprentis n’avaient pas accès à la mobilité longue. J’en ai fait la priorité de mon mandat de député européen en 2014, en initiant le projet pilote Euro App’. En France, cette mobilité européenne, courte et longue, peut grandement améliorer le regard porté sur l’apprentissage, alors qu’aujourd’hui beaucoup s’y orientent par défaut. 

 

Quel sera le rôle de la fondation que vous créez ? 

Cette fondation sera opérationnelle d’ici la fin de l’année 2019. Elle est le prolongement de l’expérimentation menée par la Commission européenne. L’objet principal est de créer une plateforme, pour mettre en commun les souhaits des candidats et des entreprises… Je compte prendre appui sur les bonnes volontés, naturellement le CCCA-BTP, mais aussi les groupes internationaux qui ont des antennes dans l’Union européenne. Et dès qu’un frein apparaître, nous irons à la rencontre des autorités académiques et politiques en France pour tenter de le lever. 

La Fondation va également évaluer les systèmes d’apprentissage dans les 28 pays de l’Union européenne, pour repérer ceux qui sont les plus compatibles avec notre vision des choses et collaborer en priorité avec eux. Une autre de ses missions sera d’apporter une forme d’ingénierie, pour mettre en synergie les différents crédits de l’Union européenne (Erasmus+, fonds de développement régional et fonds social européen). Un réel travail est à faire avec deux directions générales de la Commission européenne : celles de l’emploi et de l’éducation-culture qui fonctionnent un peu en silo.  

 

Quels blocages restent à lever pour que ce dispositif se déploie pleinement ? 

Au-delà des blocages financiers, juridiques et académiques, le principal blocage est psychologique. La mobilité longue des apprentis ne fonctionnera que si les jeunes ont envie de partir, de sortir de leur zone de confort. Un jeune qui a bénéficié d’une telle expérience n’a pas besoin de diplôme pour être recruté : en partant, il a déjà manifesté un trait de caractère qui le distingue des autres. Et puis, la mobilité longue marchera si les acteurs de terrain s’en emparent. Les premiers d’entre eux doivent être, à mes yeux, les CFA. Ils doivent être des pivots. Cela signifie aussi que les opérateurs de compétences (OPCO) définissent leur priorité et prennent en compte les coûts spécifiques des établissements de formation qui auront choisi l’ouverture internationale. 

Un autre point crucial est l’importance des langues. Il va falloir, à l’image des grandes écoles, que les CFA dispensent des cours en anglais. Au moment du projet pilote, nous avons eu des candidats des pays de l’Est. Quand ils ont constaté qu’il n’y avait pas de cours en anglais dans les CFA Français, ils ne sont pas venus. Pour que cela fonctionne, les freins doivent être levés partout, pas seulement en France. Nous sommes à la veille d’une révolution copernicienne. 

 

Jean Arthuis

 

Crédit photo : CCCA-BTP/V. Bourdon