Cet article fait partie d’une série de publications dédiées à la formation et à la construction au Danemark. Les informations présentées dans ces écrits ont été recueillies par des professionnels du BTP lors d’un voyage d’apprentissage (Lex) organisé à Copenhague en juin 2023 par WinLab’, l’incubateur du CCCA-BTP. 

Les conclusions de ces articles sont basées sur les observations des participants, les visites de sites et les échanges avec les intervenants et la population locale. 

Copenhague : une architecture alliant design, confort de vie et préoccupations écologiques

Copenhague, au Danemark, est mondialement reconnue pour son urbanisme exemplaire et sa diversité architecturale. Le centre-ville prospère de la ville se distingue par des réalisations contemporaines remarquables, des espaces publics attrayants et une vie foisonnante. Ce résultat est le fruit d’une planification minutieuse qui s’est déroulée tout au long de la seconde moitié du 20ème siècle, avec la collaboration tant d’architectes internationaux de renom que d’une nouvelle génération d’architectes danois talentueux.  

Copenhague est célèbre pour son équilibre entre l’architecture ancienne et ancienne. Les projets ambitieux, tels que le National Museum of Art et le Black Diamond, Inner City, Christianshavn et Frederikstad, ont contribué à asseoir sa réputation d’excellence en matière d’architecture. 

Principaux concepts de l’architecture danoise

• Le design danois est délibérément axé sur la satisfaction des besoins du quotidien. Copenhague, en particulier, est le berceau du concept « design pour améliorer la vie », où l’accent est mis sur la création de solutions simples et fonctionnelles pour rendre la vie quotidienne plus agréable et pratique.  

• Les nouvelles constructions sont conçues avec une vision centrée sur la vie quotidienne des habitants, combinant des usages culturels, résidentiels et commerciaux. Les architectes accordent une importance primordiale à la fonctionnalité et à l’interaction sociale entre les individus, en plus de l’aspect esthétique et de la convivialité des bâtiments. 

• Parmi les exemples remarquables de cette approche, nous trouvons le Cycle Serpent, le Tietgenkollegiet et le Tallet. Ces deux derniers sont des bâtiments résidentiels conçus spécifiquement pour rassembler les gens et favoriser les échanges et la communauté entre les résidents. 

• La lumière, l’eau, les espaces ouverts et la durabilité sont les piliers du récent essor architectural dans la capitale danoise. Cette évolution vers un urbanisme audacieux et une architecture de renommée mondiale est particulièrement visible dans quatre zones clés de la ville : Ørestad, Nordhavn, le centre-ville et surtout le long du front de mer de Copenhague. Ces nouveaux bâtiments partagent une caractéristique commune : leur proximité avec l’eau et la manière dont ils reflètent harmonieusement cet élément essentiel de la vie urbaine.  

Zoom sur quelques projets visités

Projet Fehmarnbelt tunnel (société Vinci) 

Le projet Fehmarnbelt Tunnel vise à relier l’Allemagne au Danemark via un tunnel, offrant un gain de temps de 2 heures.  

Ce tunnel extraordinaire comprend 25 kilomètres d’alignement, dont 18 kilomètres de tunnel immergé, en faisant le plus long au monde. La pose de 79 éléments de béton nécessite une main-d’œuvre importante, comprenant 500 cols blancs et 2000 ouvriers, totalisant 12 millions d’heures de travail. 

Une approche environnementale rigoureuse a été adoptée en tenant compte de 41 000 commentaires des Allemands et 400 du côté danois pour préserver l’environnement et la biodiversité des milieux. Des mesures de protection de la faune, comme la nidification, ainsi que la préservation des sols et la création de plages pour compenser des deux côtés du tunnel ont été mises en place. 

Cependant, à l’époque du gain du chantier, les considérations concernant le bilan carbone n’étaient pas aussi prédominantes, et il n’y a pas eu de bilan carbone réalisé pour le projet.  

Le quartier Nordhavn : Un modèle d’urbanisation réfléchie et durable à Copenhague  

Le quartier Nordhavn à Copenhague est le fruit d’une volonté politique de repenser l’avenir de la ville face à une augmentation importante du nombre d’habitants et à la saturation de l’immobilier. Le projet comprend trois quartiers principaux : 

– le Nord du port, qui met l’accent sur l’équilibre entre zones résidentielles, de bureaux, scolaires et de loisirs dans un même espace 

– les anciennes usines Carlsbergs réhabilitées en habitations 

– le quartier Sud du port, axé sur des usages résidentiels et commerciaux 

L’approche architecturale et urbanistique adoptée pour le quartier Nordhavn repose sur plusieurs piliers essentiels. Tout d’abord, la mobilité est au cœur du développement, avec la mise en place de réseaux de métro, bus, train et vélo, facilitant ainsi la mobilité douce des résidents. De plus, une combinaison réfléchie de rénovation-réhabilitation (pour un tiers des bâtiments) et de constructions neuves (pour les deux tiers restants) a été adoptée pour préserver l’héritage historique tout en créant de nouveaux espaces modernes. 

Le quartier Nordhavn tire parti de sa position géographique en valorisant le port et en s’articulant autour de l’élément de l’eau. Toutefois, le développement de parcs et d’espaces verts reste limité. Les matériaux de construction principalement utilisés sont le béton et la laine de verre, avec une préfabrication très développée au Danemark pour optimiser les constructions, en intégrant l’isolation. En matière d’énergie et de gestion des déchets, le quartier vise une empreinte carbone réduite grâce à une énergie verte issue de sources éoliennes et d’un incinérateur qui produit à la fois chauffage et électricité. 

L’architecture du quartier Nordhavn combine habilement tradition et modernité. Les logements traversants avec cour intérieure sont privilégiés, correspondant au mode de vie danois qui allie ouverture vers l’extérieur et besoin d’un refuge calme. Des bâtiments anciens, tels que les silos, sont réhabilités en bureaux ou logements tout en préservant leur identité d’origine ou en les réinterprétant. Des nouvelles constructions, comme une école allant de la primaire au lycée, sont équipées de panneaux photovoltaïques pour viser une neutralité carbone. 

Le quartier Nordhavn se distingue par sa démarche d’hybridation des lieux et espaces, avec un équilibre entre des zones résidentielles, de bureaux, études et de loisirs dans le même quartier. 

 Copenhill : Une Centrale Énergétique aux Fonctions Multiples  

Le projet Amager Bakke, connu aussi sous le nom de Copenhill, a été conçu par l’un des plus prestigieux cabinets d’architecture danois Bjarke Ingels Group (BIG).  

Si ce projet a remporté le prix d’architecture World Building of the Year en 2021, c’est parce qu’il détonne dans le paysage copenhagois, au sens propre comme au figuré par son audace : Copenhill est un incinérateur de déchets où on peut skier, se promener et faire de l’escalade   

Avec son investissement de 650 millions d’euros, le projet a suscité un large soutien politique : sur les 189 députés qui se sont exprimés sur ce projet, 169 ont voté en faveur de sa construction et de sa mise en place. La centrale traite annuellement 613 000 tonnes de déchets, avec un seuil minimum nécessaire pour assurer sa rentabilité de 430 000 tonnes. Elle alimente plus de 30 000 logements en électricité et plus de 70 000 en chauffage. 

Cependant, pour atteindre ce seuil dans les premières années, des déchets provenant de pays étrangers ont été importés, soulignant ainsi le défi de la gestion des déchets dans la région et au-delà. La durabilité réelle de cette centrale qui produit du biogaz pose question. Bien que l’idée de production d’énergie à partir de déchets soit intéressante, l’importation de déchets non recyclables et potentiellement polluants depuis les régions avoisinantes soulève des préoccupations environnementales. Est-il possible d’en garantir un bilan carbone positif ? 

Colline de 124 mètres au milieu d’un territoire peu vallonné, Copenhill illustre également l’urbanisme discursif de Copenhague. La spécificité de cette centrale est qu’elle marie l’industrie de traitement des déchets avec une combinaison de loisirs étonnants : le ski et l’escalade !  

En effet elle offre aux Danois une expérience unique en leur permettant de skier et de faire de la luge sur une grande colline longue de 500 mètres aménagée avec un revêtement synthétique. Elle offre également le plus haut mur d’escalade du monde avec ses 85 mètres. En haut, un lieu de restauration et de détente accueille les skieurs, et le long des pistes diverses essences d’arbres et d’arbustes ont été plantées pour garantir la place de la biodiversité.  

Cette infrastructure pour le moins originale jouxte nombre d’habitations collectives à proximité. Y habitent des riverains de toutes classes, preuve que la proximité de l’incinérateur, dont se dégage de la vapeur d’eau et pratiquement aucune odeur, n’a pas altéré l’attractivité du quartier.  

Cette fusion d’activités industrielles et de loisirs témoigne de l’approche novatrice de la ville dans la création d’espaces multifonctionnels. 

Malgré les inquiétudes, Copenhill démontre une logique économique pragmatique qui vise à trouver des solutions rentables. La production d’énergie et les activités de loisirs sont étroitement liées, et les responsables du projet privilégient des options plus économiquement avantageuses, même si elles peuvent ne pas être les plus écologiques à long terme. 

 

 La Gare Køge Nord : Une Fusion Audacieuse d’Architecture et d’Innovation Environnementale 

La gare Køge Nord, construite par le cabinet d’architecture Dissing et Weitling, est rapidement devenue une véritable icône architecturale au Danemark, recevant de nombreux prix prestigieux. Cette gare est bien plus qu’un simple lieu de transit ; elle incarne une vision novatrice pour l’avenir des infrastructures de transport, en mettant l’accent sur l’efficacité énergétique et la connexion harmonieuse avec son environnement naturel. 

Une première caractéristique de la gare est l’utilisation de vitres orientées au nord pour éviter la chaleur du soleil. De plus, ces vitres sont dotées d’une technologie « autoclean », permettant de se nettoyer automatiquement grâce à l’action conjointe du soleil et de la pluie, éliminant ainsi le besoin d’interventions humaines fréquentes. 

Le bâtiment lui-même se distingue par son design ouvert, sans climatisation ni chauffage, profitant de la caisse de résonance du bois pour réguler la température intérieure. L’harmonie entre le froid de l’aluminium extérieur et la chaleur du bois à l’intérieur offre une atmosphère accueillante aux voyageurs. 

Un objectif clé de la gare Køge Nord est de relier tous les axes et moyens de transport pour limiter l’utilisation de la voiture et favoriser le développement des transports en commun dans la région. À cette fin, elle offre une combinaison d’arrêts de trains et bus régionaux et nationaux ainsi que des pistes cyclables. La démarche architecturale du cabinet Dissing et Weitling vise à allier tradition et innovation, avec une attention particulière portée au matériau bois, inspirée par l’icône du design danois, Arne Jacobsen, créateur de la célèbre chaise Fourmi. L’objectif est de développer ce concept novateur à l’international, en mettant en avant la fonctionnalité, l’environnement et l’esthétisme. 

La gare Køge Nord se fond également dans la nature environnante, s’intégrant harmonieusement dans le relief du paysage. Néanmoins, des avis d’étonnement persistent quant à l’impact sur la biodiversité, suscitant des interrogations sur une évaluation approfondie de cette coexistence entre l’infrastructure et l’écosystème local. 

 

Pour conclure, la visite des différents éléments à Copenhague révèle une approche globale et ambitieuse en matière d’urbanisme, d’architecture et de développement durable. La ville met en avant une volonté de créer des espaces harmonieux et fonctionnels, en accord avec la nature environnante, tout en s’engageant activement dans la transition écologique. Des initiatives novatrices telles que Copenhill ou la gare Køge Nord démontrent que Copenhague cherche à avoir une longueur en avance sur son temps, à inspirer et à partager son modèle avec d’autres pays pour un avenir plus vert. 

En savoir plus : repères historiques

L’architecture de Copenhague a été marquée par différentes périodes tout au long de son histoire. L’époque médiévale a laissé des empreintes avec des bâtiments tels que l’église de Saint-Pétersbourg et la cathédrale de Roskilde datant de 1170. 

La Renaissance a été marquée par l’essor de la ville et les efforts de Christian IV, surnommé le roi constructeur, qui s’est impliqué dans d’importants projets tels que le château de Rosenborg et le palais de Frederiksborg. Il a également fondé  des espaces verts importants tels que King’s Garden et Kastellet. 

Le Baroque a vu l’urbanisme évoluer avec l’arrivée de Christianshavn et l’architecture remarquable de la tour ronde et de l’église de Notre-Sauveur ainsi que le palais de Fredensborg.  

Le Rococo a donné naissance à Frederiksstaden, un complexe rococo important en Europe, avec le palais d’Amalienborg comme centre.  

Au XIXe siècle, l’architecture classique et l’historicisme ont prédominé, avec des architectes tels que CF Hansen et Vilhelm Dahlerup ayant une influence marquante.  

Puis, au début du XXe siècle, l’architecture moderne a été introduite par Arne Jacobsen, suivi par des développements urbains et des rénovations dans les années 1930, 1940 et 1950.  

Les années 1970 et 1980 ont été caractérisées par une architecture modulaire internationale sans caractère distinctif, mais les années 1990 ont vu une véritable floraison architecturale, avec des projets tels que le Black Diamond.  

Enfin, au XXIe siècle, Copenhague a connu une explosion d’architecture moderne, tant de la part des architectes danois que des architectes internationaux. La ville a été désignée Capitale mondiale de l’architecture pour 2023 par l’UNESCO.  

Copenhague continue de se développer avec des projets audacieux, tout en préservant son patrimoine architectural riche et en adoptant des approches durables et innovantes pour l’urbanisme.  

Pour en savoir plus : https://www.hisour.com/fr/architecture-in-copenhagen-31373/ 

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Rédacteurs : Isabelle Jouanin-Perin, Olivier Cenille, Clément Ménager, Alexandre Van Ausloos, Samia Bru, Jocelyne Luzayamo 

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